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Les atomes existent-ils ? Rapport entre sciences et monde

21 Mai

Atome au microscope électroniqueLa question initiale est la suivante : les atomes existent-ils ? Sujet d’une conversation animée, hier, au travail, avec des passionnés de sciences, je ne pouvais pas manquer d’en faire un billet.

Au premier abord, il paraît aller de soi que les atomes existent, que l’on peut les observer, notamment avec des appareils tels que des accélérateurs de particules. La question semble donc n’avoir que peu d’intérêt, voire pousser vers la légèreté intellectuelle ceux qui osent répondre par la négative à cette question.

Dès à présent, pourtant, je pose la thèse suivante : bien que correspondant nécessairement à des propriétés du « monde réel », les atomes n’existent pas réellement, mais uniquement au sein d’un ensemble de théories scientifiques qui offrent un certain découpage du monde. Autrement dit, les atomes n’existent que comme objets, entités scientifiques et non comme objets indépendants de l’esprit humain (objet en soi), bien qu’ils reposent cependant sur une adéquation forte avec le « monde réel ».

Une question peut en cacher une autre

De nombreux problèmes philosophiques (et non scientifiques) se cachent finalement derrière cette question à la réponse en apparence évidente. Quel est, par exemple, le rapport entre les sciences et le monde ? Les sciences nous donnent-elles à voir le monde tel qu’il est ? La notion même de vérité entre en jeu : les sciences visent-elles la monstration du « monde réel », « tel qu’il est » et, en ce sens bien particulier, la vérité (comme adéquation totale et objective au réel) ? Les sciences sont-elles le seul moyen ou, du moins, le moyen le plus adéquat pour accéder au monde tel qu’il, essentiellement ? D’autres questions, connexes, sont également en jeu : y-a-til un progrès des sciences. Et même, plus pertinemment : y-a-til un état final des sciences (qui correspondrait finalement à la connaissance totale et parfaite du monde « tel qu’il est vraiment ») ?

Ce billet se veut plus une base de discussion qu’un exposé théorique de ma thèse. Je me contenterai donc ici de poser les piliers fondamentaux de celle-ci, sans m’astreindre à la rigueur d’un exposé complet et finement argumenté.

Et l’ether : n’a-t-il pas existé ? Quand le scientiste, voire réductionniste se découvre…

Il y a quelques temps déjà, on tenait pour assurée l’existence de l’éther. La nature a horreur du vide : cette croyance, qui remonte à l’antiquité grecque, a habité la science jusqu’au XXème siècle. Pour des générations entières de scientifiques, l’éther existait et occupait une place centrale dans les théories scientifiques. L’éther était essentiel dans leur vision du monde.

Quelle est la différence entre l’existence de l’éther et l’existence de l’atome ? Pour un scientifique convaincu du progrès des sciences vers la vérité, elle est énorme : l’existence de l’éther est une croyance erronée qui a été remplacée par une croyance vraie, par un savoir. Nous savons désormais que l’éther était une illusion et que le monde est, réellement, en fait constitué d’atomes. L’atomisme est la seule vision vraie du monde. Dans 500 ans, les scientifiques auront amélioré les théories scientifiques, mais les atomes existeront encore.

Nous pouvons déjà noté ici une mégalomanie de ce type de scientifique : il pense que ce qu’il sait est « vrai », contrairement à ce que l’on peut observer dans les stades antérieurs des sciences. Autrement dit, nous approchons du stade ultime des sciences, de leur état final : de leur accomplissement, compris comme accès à la « réalité telle qu’elle est », après 2000 ans d’errance des scientifiques. Le scientifique moderne (selon ce type de scientifique) détiendrait presque la vérité. Attention ! Je ne réduis pas tous les scientifiques à ce « type de scientifique ». J’analyse ici l’archétype du scientifique comme scientiste.

Le scientisme consiste, notamment, à postuler que seule les sciences dures peuvent accéder à la vérité (pas de vérité en dehors de celles-ci, par exemple en sciences sociales) et que l’accès au monde réel est porté par les sciences dures, et par elles seules. Il s’agit, in fine, d’une confiance totale dans les sciences dures qui nécessairement nous feront apparaître la vérité.

Le réductionniste ne se tient d’ailleurs pas loin : tout pourrait être expliqué par les sciences dures, jusqu’à notre pensée et la psychologie humaine. Tout, finalement, ne se réduirait-il pas à des phénomènes physico-chimiques et des relations mathématiques ? Ce n’est qu’une question de temps : la science, un jour, expliquera tout. Et cette explication totale approche… La réalité se réduit à un objet de la physique et de la chimie, surplombées par les mathématiques. Connaître cet objet n’est qu’une question de temps. Même si les progrès ne sont pas continus vers la connaissance totale et vraie de cet objet, il y a un progrès indéniable et nous accèderons bientôt à cette connaissance totale.

Cette vision, exposée de manière expéditive et surtout un peu caricaturale (quoique…), me semble erronée et véhiculer de nombreuses illusions séculaires.

Méthodologie ou ontologie : le coup du canard-lapin

Postuler que le monde se réduit à des phénomènes physico-chimiques est une exigence méthodologique. Par principe, pour la science, il faut mettre de côté tout ce qui ne serait pas d’ordre physique ou chimique. C’est grâce à ce principe méthodologique que les sciences dures ont tant progressé.

Que le monde « réel », « tel qu’il est », se réduise uniquement à des phénomènes physico-chimiques est par contre une thèse métaphysique (et non scientifique). Il ne faut en effet pas confondre méthode et ontologie. La science ne prétend pas faire apparaître le monde tel qu’il est en soi : elle prétend expliquer les phénomènes et leurs relation au sein d’un système, si possible unifié, de théories construites. La science développe des paradigmes. L’image célèbre du « canard-lapin » illustre parfaitement cela :

Canard-lapin, sciences et paradigme

Certains voient dans cette image un canard, d’autres un lapin. De la même manière, deux paradigmes différents nous conduisent à avoir deux visions différentes du monde. Le passage d’un paradigme à l’autre se fait via l’apparition d’une « science révolutionnaire » (ou d’un état révolutionnaire de certaines théories) qui, petit à petit, va devenir la « science normale », après adoption progressive par les scientifiques du nouveau paradigme. Ainsi progresse la science : par révolutions et modification des modèles qui sont autant de visions du monde. Mais le monde en soi n’est ni canard, ni lapin…

Le risque du relativisme et du subjectivisme

Le risque de cette position est alors de tomber dans le relativisme. Puisque la science ne progresse pas vers la monstration du monde tel qu’il est mais vers des modèles qui nous permettent d’expliquer le monde et les relations entre les phénomènes au sein d’un système donné de théories, ainsi que d’agir sur le monde (précision de ma thèse), il devient indifférent de choisir tel paradigme plutôt que tel autre ?

Personnellement, je pense qu’il y a un progrès des sciences. L’état actuel des sciences est meilleur qu’à l’époque d’Aristote. Nos paradigmes actuels permettent de résoudre de très nombreux problèmes et de proposer un système particulièrement cohérent du monde (dans ses grandes lignes). Mais je reste persuadé que nos connaissances ne sont qu’une grille de perception que notre cerveau nous propose pour appréhender le monde, un intermédiaire, une médiation. Les théories scientifiques ne sont, je le répète, qu’un intermédiaire. Jamais elles ne nous feront accéder à « l’essence du monde », à ce qu’il est « réellement ». Est-ce que la cause et l’effet existent ? Est-ce que les atomes existent ? Est-ce que la nature est réellement écrite en langage mathématique ? Je ne le pense pas. Par contre, il est indéniable que nous la saisissons grâce à cela et que nous avons réussi par ce moyen à maîtriser notre environnement et à développer les technosciences.

Surtout, il faut nécessairement admettre que les objets scientifiques reposent bel et bien sur une certaine adéquation avec les données du monde. Si les sciences ont adopté l’atomisme, c’est bien parce que dans le monde, il y a quelque chose que nous pouvons ainsi « découper ». Mais le monde en lui-même n’est pas découpé : c’est toujours la science qui opère le découpage. Un autre découpage reste possible dans un autre ensemble de théories. Mais il est indéniable que les découpages ne sont pas tous équivalents. « L’existence » de l’atome a plus de raisons d’être défendu que « l’existence » de l’éther. Mais on ne parle ici que d’existence méthodologique et non ontologique.

En défendant, comme je l’ai fait à l’instant, que les découpages correspondent bien à des données du monde, j’évite par la même occasion la casquette d’idéaliste. Pour rappel, l’idéaliste peut par exemple postuler que le monde n’est en fait qu’une représentation de l’esprit.

Conclusion

Oui, les atomes existent, en tant qu’objet scientifique. Méthodologiquement, postuler que le monde doit être conçu sur des bases atomistes est pour l’instant le meilleur choix scientifique. Aucune théorie révolutionnaire n’incite à bouleverser cette vision du monde.

Non, il n’est pas correct, scientifiquement, de dire que les atomes existent réellement et que le monde se réduit à des atomes et des relations entre les atomes. Cela demeure une croyance de type métaphysique. Le réductionnisme est ou bien méthodologique, ou bien métaphysique.

Je me suis interdit de citer des philosophes dans cet article afin de ne pas me voir reprocher d’obscurcir le débat pour les non philosophes. Pour ceux que cela intéresse, je livre néanmoins mes inspirations : Kant, Kuhn, Aristote, Wittgenstein, Démocrite, Cassirer, Chalmers, Bachelard, Nietzsche… et bien d’autres. Encore une fois, je me suis limité à un exposé rapide, simpliste même, pour que le sujet reste ouvert à la discussion.

En dernière analyse, on peut se demander si « le monde en soi » existe… Mais là, on entre dans une réflexion encore plus complexe.


 
34 commentaires

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  1. Haeresis

    25 mai 2010 à 12:16

    Ce qui me rebuttera toujours, même si c’est peut être un peu hors sujet là, c’est de voir à quel point la conscience humaine s’efforce à faire d’elle-même et de sa réflexion, le centre du monde, et le centre de toute chose. Comme si la conscience était une vérité absolue et le croire jusqu’à parfois même, comme c’est le cas ici, renier ce qui l’a porté au jour.

    Je sais qu’il était impossible de croire en l’existence de microscopiques organismes il y a des années, même si pourtant émettre l’hypothèse que de petites choses invisibles étaient responsable de démangeaison était d’actualité. Le parallèle à faire sur les atomes est un débat qui n’est déjà plus d’actualité dans le sens où, on sait qu’ils sont là, puisqu’on les manipules, on en fait des ensembles de molécules artificiels qu’on appelle des Nanomachines, on n’en ferra même un jour l’unité de l’information virtuelle enregistrable. Sans parler du fait que l’on écris des choses, avec, juste pour s’amuser (photo retouché pour la perception de l’oeil humain).

    Si le principe ici est de dire qu’un atome n’est pas rond, et qu’il n’est physiquement pas représentable et qu’il n’est qu’une transposition de la réalité pour que nos yeux puissent l’appréhender, alors il n’était pas nécessaire de philosopher la dessus. Et si on veut réellement prouver que l’unité d’une molécule est quelque chose d’inexistant, alors il sera difficile d’expliquer à des ingénieur électronicien pourquoi en manipulant les électrons (associé à un atome) ils arrivent à faire fonctionner les joujous que tous les mordu de Steve Jobs vénère, comme des fana de bagnole avec les Ferrari. Il sera également difficle d’expliquer à tous ses ingénieur en énergie, comment la libération d’ion venant des atomes peut ainsi produire des batteries qui alimente la petite iVie de bien des iAdictes.

    Il y a quelque chose, que nous avons décider de nommer Atome, et à laquelle nous avons attribué une représentation à l’echelle humaine pour en comprendre sa constence.

    Et peu importe qu’ils soient dessinable, qu’ils existent, ou qu’il ressemble à quelque chose de commun, ils sont là. Il ne sont peut être que « masse » mais ils sont là, et ils influt de par leurs « masses » qu’on le veuille ou non quelque chose que l’on appelle « gravité », qui tiens la mécanique céleste, du plus gros ama de galaxi à la plus petite poussière, en équilibre. Et ça, ça dépasse notre conscience, et notre science.

    Pour moi c’est ça, qui est le centre de mon monde, ces particules, qui portent les propriétés de l’univers. Et ce que votre philosophie, votre conscience tente de faire disparaitre, pour s’élever au rend d’unique vérité, moi je n’y adhère pas. Je ne renie ni la science, ni la logique, surtout quand je m’aperçois qu’au file du temps elle concorde avec mon appréhension de la réalité et qu’elle me permet de faire des choses concrète.

    Le fait d’être sur ce blog, à penser, à écrire, à stocker les informations sur un serveur, à porter les informations via la circulation des electrons autour des atomes est une réalité.

    Le seul dieu qui existe, c’est la formidable mécanique produit par ses atomes, les mêmes que vous tentez de faire passer comme inexistant, et qui ont donné la conscience, qui ont donné l’homme, qui ont donné cette pensé égoïste qui ne veut pas admettre qu’il n’est que poussière d’atome, qu’il n’était rien, et qu’il finira rien.

    Un ama d’atome qui a pris conscience de sa propre existence dans l’espace et le temps, et qui passe ce temps ainsi perceptible, à se poser des questions aussi inutile que la vie elle même… et je n’ai pas dit que la vie était inintéressante, j’ai dit qu’elle était inutile, un peu comme tout, finalement.

     
  2. Pierre

    26 mai 2010 à 22:36

    Le paragraphe préliminaire de ce long commentaire est tout sauf hors sujet. Croire que la science permet de connaître l’essence intime du monde, que nous sommes sur le point d’avoir une connaissance totale et vraie de l’univers, n’est-ce pas justement faire preuve au plus haut point d’une confiance démesurée dans la conscience humaine ?
    Est-ce que le fait de manipuler le monde prouve que les théories scientifiques sont vraies ? Absolument pas. Je ne répondrais donc pas aux 2ème et 3ème paragraphes qui me semblent épistémologiquement hors sujet.

    Le monde existe, il présente des propriétés physiques qui se laissent découper par nos concepts. L’idéal des sciences est de parvenir à une adéquation totale et parfaite. Effectivement, le monde est là indépendamment de notre conscience. Mais la « gravité », les « atomes » ne sont qu’une perspective (humaine) sur le monde. Qu’est-ce qui vous permet de dire que ces notions finalement récentes ne seront pas remises en cause dans 50 ans ou 500 ans ? Savez-vous, au passage, que l’atomisme n’est pas indispensable – ni même admissible – pour l’ensembles des branches de la physique ? Mais qu’est-ce que signifie une chose réelle qui existe pour un ensemble de théories, mais qui ne peut avoir d’existence pour un autre ensemble de manière synchronique ????!!!

    « Le seul dieu qui existe, c’est la formidable mécanique produit par ses atomes, les mêmes que vous tentez de faire passer comme inexistant, et qui ont donné la conscience, qui ont donné l’homme, qui ont donné cette pensé égoïste qui ne veut pas admettre qu’il n’est que poussière d’atome, qu’il n’était rien, et qu’il finira rien. « . ==> On arrive au coeur de ma thèse : le scientisme est une idéologie (une religion dans votre commentaire).

    Je récapitule ma thèse car je pense qu’elle n’est pas comprise comme il faut : dans le monde, il y a des éléments physiques auxquels correspondent PLUS OU MOINS le concept d’atome, au sein d’un certain ensemble de théories physico-chimiques. Mais l' »atome » reste un objet non pas du monde réel mais un objet scientifique. Franchir le gouffre entre théorie et réalité, entre méthodologie et ontologie, c’est faire de la métaphysique et quitter la science.

     
  3. Troll de Mantes

    30 mai 2010 à 21:33

    Sujet intéressant ! Mais ta démonstration comporte, à mon avis, des erreurs ; tu t’en serais douté de ma part…

    La première est de faire un parallèle entre atomes et ether. En effet, les atomes sont observables et ont des propriétés physico-chimiques mesurables. Au contraire l’ether n’a jamais eu le statut d’objet scientifique. L’ether n’était pas une « illusion » comme tu l’écris, mais un concept élaboré pour expliquer le monde tel que l’on croyait qu’il fût. C’était une hypothèse comme la matière noire actuellement (du moins je crois que c’est toujours une hypothèse) ou les atomes dans l’antiquité : un concept philosophique. Il y a donc une très grande différence entre l’ether, concept philosophique, et les atomes, objets observables.

    La seconde erreur est celle du canard-lapin. Le corpus scientifique est constitué de faits observables, de lois et de théories explicatives (les paradigmes) faisant souvent intervenir des concepts plus philosophiques que scientifiques. La très grande majorité des scientifiques sont conscients de cela. Mais il est vrai que lorsqu’un nouvelle théorie arrive et contredit la précédente (changement de paradigme), c’est souvent une remise en cause complète de la conception du monde des partisans de l’ancienne théorie. Remise en cause que certains ne peuvent faire… Un changement de paradigme ne remet pas en cause les faits observables et les lois, mais remet en cause essentiellement les concepts « philosophiques » des théories.

    On ne peut pas dire que les atomes n’existent pas : ils existent. Ce sont des objets observables. Quelle est la nature des atomes est une autre question… De grain de matière insécable l’atome est est maintenant vu comme des nuage de probabilité de présence de ses particules constitutives. Quelle sera la vision que nous aurons de l’atome dans le futur ? Bien malin celui qui pourrait le dire.

    Ton article cherche a démontrer une thèse, issue de ta représentation du monde, portant sur un sujet que tu ne maîtrise pas, la science (ce que l’on ne saurait te reprocher puisque tu n’es pas scientifique). En profiter pour traiter de mégalomane un certain type de scientifique est tout simplement gratuit.

    Merci pour l’absence de référence à des philosophes et à des concepts que seuls des philosophes peuvent maîtriser.

     
  4. Pierre

    30 mai 2010 à 23:38

    Il me semblait hier qu’un accord avait été obtenu sur l’existence purement théorique des atomes.

    La notion de « fait observable » me semble devoir être éclaircie.

     
  5. Troll de Mantes

    31 mai 2010 à 8:15

    A la lecture de ton article, il me semble que notre accord repose sur un malentendu.

    Quels éclaircissements souhaites-tu sur la notion de « fait observable » ?

     
  6. Pierre

    3 juin 2010 à 21:27

    Penses-tu qu’il existe des faits scientifiques directement observables, de manière neutre ? Ne penses-tu pas que l’on doit parler d’expérimentation (construction d’une expérience) et d’observation basée sur des outils… scientifiquement conditionnés ? (au passage : source = Bachelard). Bref : penses-tu vraiment que les atomes s’observent comme on observe une table ou une fille dans la rue ? Sinon, en quoi se distingue l’observation scientifique de la simple observation empirique ?

     
  7. Troll de Mantes

    6 juin 2010 à 20:04

    Ta remarque est intéressante. Mais avant : que penses-tu des arguments que j’ai avancé ?

     
  8. Pierre

    6 juin 2010 à 21:11

    Je pense que la distinction entre éther et atome est moins simple que cela.
    Certains scientifiques n’observaient-ils pas des homoncules dans la semence humaine, observation bien sûr guidée par la théorie du préformisme ? Je n’ai pas en tête d’expérience relative à l’éther mais je suis sûr qu’un scientifique a cru observer l’éther… Et si l’atome est un « objet observable », je réitère ma question concernant la différence avec une observation purement empirique.

    Concernant ta dénonciation de ma deuxième erreur : penses-tu vraiment qu’un changement de théories laisse les « faits scientifiques » inchangés ? Crois-tu vraiment que les atomes d’il y a 2 siècles et ceux aujourd’hui sont les mêmes choses ? Ne s’agit-il pas d’une illusion grammaticale ? Cela se rapprocherait de l’illusion du précurseur, illusion qui consiste souvent à réinterpréter le passé à partir du présent.

    Je ne retire pas le terme de mégalomanie, comprise comme surestimation de ses capacités. Le scientifique que j’ai décrit surestime son pouvoir d’accès à la réalité et, surtout, son positionnement dans le cours de l’histoire. Il pense que les objets scientifiques qui l’entourent ne pourront pas être abandonnés dans un état futur de la science. Il pense donc être mieux loti que ses prédécesseurs qui eux ont commis des erreurs concernant les objets observables.

    Je pense que notre point de désaccord réside sur le rapport entre théorie et expérience. Je pense qu’en science, l’expérience s’inscrit dans un ensemble de théorie. Il n’y a pas de fait neutre, aseptisé : un scientifique construit toujours son expérience dans une sorte de grille théorique bien déterminée. L’observation de faits « anormaux » n’est-elle pas le signe que les théories sont insatisfaisantes ?

    Je comprends ton argumentation, mais le positionnement opposé sur la distinction précédente me semble expliquer notre divergence d’opinion.

    Je te laisse donc, si tu en conviens, m’exposer plus clairement ce que tu conçois comme un fait scientifique, une évidence empirique scientifique.

     
  9. Troll de Mantes

    7 juin 2010 à 23:23

    Je reprends point par point.

    Tu penses « que la distinction entre éther et atome est moins simple que cela ». Peut-être, mais l’argumentation est plutôt faible… ;o) Non les scientifiques ne voient pas d’homoncule dans les spermatozoïdes. Il y a quelques centaines d’années, certains observateurs l’avaient effectivement cru. Pourrais-tu retrouver quel scientifique a cru observer l’ether ? Il est toujours plus intéressant de discuter avec des preuves plutôt qu’avec des convictions. L’observation te semble poser problème, parce qu’elle dépendrait de théories, sous entendus pouvant être remises en cause, ce qui remettrait en cause les observations. Seule l’observation visuelle serait acceptable ? L’usage d’un microscope optique rend-il douteux ce que l’on observe ? Et si j’ajoute des filtres polarisants ? Et si j’utilise des colorants ? Et si j’utilise une caméra numérique ? Et si j’utilise des algorithmes pour retravailler l’image ? A partir de quand l’outil ne permet plus de faire des observations irréfutables ?

    Oui, les atomes d’il y a deux siècles sont exactement les mêmes que ceux d’aujourd’hui ! Ils sont une réalité objective existante indépendemment de l’Homme. C’est notre représentation des atomes qui a changée. (Mais je commence à comprendre ce que tu veux dire…)

    Concernant le scientifique mégalomane, je suis certain que notre connaissance du monde est bien meilleure que par le passé et qu’elle ne peut que progresser. Cela ne veut pas pour autant dire que le corpus scientifique se construit brique après brique en les empilant les unes au dessus des autres. Certaines parties sont floues et on imagine une interprétation que l’on précise ensuite. Certaines observations sont erronées et les instruments se perfectionnant, les observations initiales sont invalidées.

    Selon moi notre divergence s’explique de la façon suivante. Le scientifique postule l’existence d’une réalité objective, imagine des expériences, fait des observations, en tire des théories qu’il éprouve par de nouvelles expériences. Le scientifique observe quelque chose, le nomme, puis le caractérise par de nouvelles expériences et l’intègre dans un modèle plus global, une théorie. Au contraire, le philosophe tel que je le comprends à travers ce que tu écris, place l’Homme (et le mot) comme point de départ. Ainsi l’atome est, pour le philosophe, un modèle d’une réalité objective inaccessible à l’Homme et qui n’a d’existence que parce que l’Homme peut se la représenter. Au contraire, pour le scientifique, l’atome est une réalité objective à laquelle il tente d’accéder en le modélisant (modèles de Thomson, de Rutherford, de Bohr, de Schrödinger, etc).

    Et pour finir : je ne sais pas ce qu’est un fait scientifique… Quelle en est ta définition ?

     
  10. Pierre

    8 juin 2010 à 23:58

    Reprenons, donc, la discussion un peu animée de ce midi, la fatigue ne rendant pas apte à un dialogue clair.
    Correction de ma part : des scientifiques ont multiplié les expériences pour prouver la théorie de l’éther, sans bien sûr l’observer directement. Alors qu’effectivement, l’atome est « expérimentable » via de grosses machines. En ce sens, il a un statut d’objectivité (au sens scientifique) supérieur.

    Je maintiens toujours que les atomes sont des objets théoriques, des symboles avec des liens complexes avec d’autres symboles. Comme expliqué ce midi, ma thèse s’étend au-dela de la science : nous vivons dans un monde symbolique, un monde de concepts par exemple. Le concept et le monde sont deux choses différentes. On ne peut pas prouver que les concepts décrivent l’essence même des choses. L’atome est un concept scientifique, pas un objet réel (si l’on reste dans les limites de la science). Tel est en tous cas ma position épistémologique. Ce que je nomme le réductionnisme, travers bien connu en épistémologie, est le fait de réduire l’essence du monde (ce qu’il est réellement) à du physico-chimique (la forme extrême consistant à vouloir définir la pensée de cette manière).

    L’atome a-t-il un même sens conceptuel au sein de l’ensemble de la physique ? Si plusieurs sens se dégagent, et si tu maintiens l’existence réelle de l’atome tel qu’il est décrit par les sciences, quel sera donc l’objet unique correspondant ?

    Poincaré disait de l’éther qu’il importe peu qu’Il existe vraiment ou pas, tant que l’hypothèse est productive. Tu me rétorqueras que l’atome n’est pas une hypothèse mais un fait.

    On revient donc à la notion de fait scientifique (une donnée scientifique). J’ai évoqué plus haut le fait que l’expérience scientifique et l’observation s’inscrivent dans un réseaux de théories et de croyances. Plus globalement (voir élargissement annoncé en début de ce commentaire), toute expérience humaine, toute perception s’inscrit à mes yeux dans un univers symbolique qui opère une mise en forme de nos sensations (intuition sensible). Ta question concernant l’observation est donc très pertinente. Je pense que nous sommes « condamnés » au rapport symbolique au monde : l’intuition intellectuelle (rapport direct au monde) est une illusion.

    J’ai tendance à penser que plus les techniques d’expérimentation sont complexes, plus elles font intervenir de théories et plus… cela illustre finalement notre rapport au monde.

    Quant à ta vision du philosophe, elle est incorrecte. Certains pensent que le monde est premier, d’autres sont idéalistes ou subjectivistes et défendent que c’est le moi qui fonde le monde. D’autres pensent que seul le monde existe. On peut aussi être sceptique, etc.

    De même le philosophe que tu vois en moi n’est pas tel que tu le penses : je ne cesse de répéter que le monde existe et précède l’homme et sa conscience. Je limite juste notre pouvoir d’accès au réel : l’essence ne nous est pas accessible. Cela ne signifie pas que le monde n’existe que du fait que nous le posons. Juste que monde symbolique et monde ontologique sont deux choses distinctes avec seulement des liens de correspondance (je ne trouve pas de meilleur mot, bien qu’il soit très imparfait).

     
  11. Troll de Mantes

    10 juin 2010 à 23:39

    Un petit commentaire en passant, parce que je suis fatigué ce soir. Je reprendrai chacun de tes argument un autre jour.
    J’ai bien compris que tu postules, comme moi, l’existence d’une réalité objective (sans quoi toute discussion est sans doute vaine). Je pense aussi avoir compris que, pour toi, toute réalité objective n’est décrite que par des concepts issus de la pensée humaine et qu’a tout moment, l’homme peut revoir du tout au tout ses concepts pour de nouveaux. Ainsi, les atomes ne sont qu’un concept qui disparaîtra au profit d’un autre englobant (ou pas) celui d’atomes dans un futur plus ou moins proche ou pas… Tu fondes ton argument sur le fait que toute observation repose sur un ensemble de théories qui pourront être remise en cause un jour.
    Je ne pense pas pouvoir te prouver le contraire. Cela nécessiterai de te délivrer une formation scientifique poussée. N’y a-t-il pas une certaine forme arrogance de la part des philosophes de critiquer les fondations du corpus scientifique sans en maîtriser la discipline ?
    Nietzsche, Kant, BHL et tous leurs petits copains sont des idiots ! Cherchez l’intrus…

     
  12. Pierre

    11 juin 2010 à 0:20

    Nous discutons épistémologie. Et s’il faut maitriser les sciences, faut-il avoir pour cela le prix Nobel, travailler au niveau international, avoir un bac+5, le bac… ?
    Je suis conscient de ne pas être scientifique. Néanmoins, j’ai lu de nombreux philosophes et scientifiques, j’ai suivi de nombreux cours de philosophie des sciences et d’épistémologie. Bref, je préfere me reposer sur des gens qui pensent beaucoup, beaucoup, beaucoup mieux que nous : ça évite de vouloir réinventer l’eau chaude. J’ai analysé les principales positions épistémologiques et ai forgé mon discours progressivement de manière rationnelle.
    Si tu doutes de mes compétences sur le sujet et pense que la question doit être tranchée scientifiquement, c’est que nous n’avons pas trouvé le seul terrain possible pour discuter de la question : l’épistémologie. si je tombe dans la même argumentation que toi (à contre-cœur): possèdes-tu le bagage philosophique nécessaire pour tenir une réflexion méta-scientifique ? Je postule que oui depuis le début. Je te laisse avoir ton opinion sur mes capacités. Mais il semble que je ne comprends rien si j’écoute les nombreux pics 😉

    Au passage : je ne critique pas le fondement du corpus scientifique. Tout simplement « l’arrogance » (pour maintenir le ton de l’attaque) scientifique du réductionniste. Car dire que la réalité se réduit à des atomes et que cette perspective (qui finalement serait la vision première, vraie du monde, la seule conception à avoir sur le monde) doit permettre de comprendre tout, y compris la pensée et les comportements humains (car il s’agissait bien de cela dans les arguments de cet après-midi), cela va au-delà de la définition de la science. On passe dans le domaine de la foi et / ou de la croyance metaphysique. On peut croire en l’unité possible des théories scientifiques, en l’approche de la vision vraie du monde par les sciences. Il demeure qu’il s’agit d’une position métaphysique.

    Vaut-il mieux rester humble et relativiser notre savoir (sans non plus renier l’immense valeur de la perspective scientifique) ou idéaliser et absolutiser les sciences dures en réduisant l’ensemble du monde à des phénomènes physico-chimiques et déterminés totalement par des lois scientifiques ? Les deux positions sont tenables. Mais la dernière nie la liberté humaine, nie la spécificité des actions humaines, nie l’utilité de la justice ou de la morale (plus de responsabilité), nie le génie de l’artiste ou la grandeur du métaphysicien : bah oui ! Tout est physiquement et chimiquement déterminé.

    Bref, ceci était un rapide commentaire pour répondre à ton rapide prélude au futur commentaire répondant point par point à mon précédent commentaire 😉

     
  13. Troll de Mantes

    11 juin 2010 à 20:09

    Je reprends por répondre à ton précédent commentaire.

    Nous sommes donc d’accord que le parallèle établie entre ether et atomes ne tient pas.

    Tu maintiens que les atomes sont des objets théoriques. Je crois comprendre ton modèle mais je ne vois aucun argument le prouvant…

    « L’atome a-t-il un même sens conceptuel au sein de l’ensemble de la physique ? » C’est le genre de phrase que je ne comprends pas… Il existe plusieurs modèles de l’atome utilisés en fonction de l’échelle à laquelle on se place. Ainsi lorsque l’on s’interesse à une protéine par exemple, on utilise la représentation de l’atome en mécanique moléculaire. L’atome est vu comme un point exerçant des forces avec son entourage (liaisons covalentes, Van der Waals, etc). Si l’on s’intéresse à des molécules de petites tailles, on utilisera un modèle issu de la mécanique quantique. Tous ces modèles modélisent (;o) les atomes qui sont des objets réels et non des concepts.

    Concernant ce que disait Poincaré de l’éther, les scientifiques ne peuvent qu’approuver. L’éther a été un outil, puisque sa réalité à été infirmé, permettant d’avancer dans la connaissance. Si son existence avait été confirmé, cela aurait été pendant un temps une hypothèse.

    Selon toi, « l’expérience scientifique et l’observation s’inscrivent dans un réseaux de théories et de croyances ». C’est une affirmation gratuite. L’expérience a justement pour but de confirmer ou d’infirmer une théorie ou une hypothèse.

    Le philosophe dont je parlais n’est pas l’archétype du philosophe, mais simplement celui que je voyais en ce que tu décrivais… Je comprends parfaitement que pour toi aussi « le monde existe et précède l’homme et sa conscience ». Mais pour toi la conscience n’aura jamais accès à la réalité objective. (Encore une phrase qui ne veut rien dire !) C’est bien ça ? Pour toi, il y a une réalité. Notre science a imaginé les atomes pour se la représenter. Un jour, elle n’aura peut-être plus besoin des atomes pour se représenter cette réalité. En ce sens les atomes n’existent pas. Juste ? Pour moi, il y a une réalité objective ayant des caractéristiques physico-chimiques observables que l’on a nommée atome. La science étudient ces caractéristiques et établie des modèles pour les décrire. Comment le prouver ?

    Ce qui nous amène à mon dernier commentaire et à ta réponse. « Nous discutons épistémologie », écris-tu. J’entends épistomologie comme philosophie des sciences. Comment peut-on philosopher sur les sciences sans connaître les sciences ? Comment peut-on être critique d’art sans connaître l’art ? Tu te reposes sur des gens qui pensent beaucoup et beaucoup mieux que nous. Beaucoup de grands penseurs n’ont pas écrit que des choses intelligentes, surtout quand ces penseurs se penchent sur les sciences (cf impostures intellectuelles de Sokal et Bricmont). Nous n’avons aucun complexe à avoir face à ces grands penseurs. Ils faut bien sûr les lire attentivement et avec bienveillance, mais ils peuvent écrire des anneries aussi. D’ailleurs, je suis sûr que parmi ces grands penseurs, s’en trouve certains qui affirment l’existence des atomes… Sont-ils de facto exclus des grands penseurs pour cela ? Pour ma part, il est évident que je n’ai pas le bagage philosophique nécessaire pour rester dans un cadre purement philosophique ! Mais ce n’est pas pour autant que je ne peux pas avoir une discussion méta-scientifique. J’utilise mes mots, mes concepts, mes arguments. S’il faut être philosophe pour pouvoir discuter avec toi, cela risque d’être compliqué…

    Pour toi, notre « réductionnnisme » est de l’ordre de la croyance. Les sciences tendent tous les jours à nous prouver le contraire en expliquant de plus en plus les phénomènes, le monde, l’homme. A condition d’admettre que les observations scientifiques permettent d’observer une réalité objective. En quoi ta position n’est-elle pas une croyance ?

    Je suis prêts à admettre que le monde n’est pas réduit à des phénomènes physico-chimiques et déterminés totalement par des lois scientifiques. Comment le prouves-tu ?

     
  14. Pierre

    11 juin 2010 à 21:25

    Tu maintiens que les atomes sont des objets théoriques. Je crois comprendre ton modèle mais je ne vois aucun argument le prouvant…
    => je te renvoie le même genre « d’argument » rhétorique 😉

    Petite question : tous ces sens de l’atome sont-ils compatibles les uns avec les autres, du point de vue de chaque corps ? Le concept d’atome correspond, quel que soit son sens à la réalité. Mais dire que l’atome, çe n’est qu’un constat de la réalité, c’est méconnaitre profondément la science. Je te renvoie sur le sujet à Bachelard ou encore à Kuhn et au rôle profondément constructeur de la science qu’ils mettent en avant et le rôle déterminant des théories dans l’observation et l’expérimentation. Je te renvoie également à l’éclairant passage de Kuhn qui explique comment les scientifiques sont en quelque sorte « conditionnés » pour défendre corps et âme le ou les paradigmes dans lesquels ils sont formés et dans lesquels ils vont ensuite exercer leurs recherches (par exemple préciser de plus en plus leurs observations du réel). Tu comprendras alors que mon affirmation n’a rien de gratuit.
    J’imagine que tu réfuteras l’idée de paradigmes incommensurables : mais il te faudra alors profondément réécrire l’histoire des sciences. Effectivement, l’expérience a notamment pour but de valider des théories ou des hypothèses. Mais elle ne fixe rien dans le marbre. Une autre expérience peut faire apparaître un résultat inattendu, une zone de turbulence qui conduira plus tard en partie à l’apparition de nouvelles théories, parfois incompatibles avec les précédentes. Certaines observations changeront alors de sens.

    Au fond, une erreur que je crois déceler dans ton argumentation, c’est qu’il y de l’immédiat, du donné tout cru dans la science et que certains résultats sont désormais garantis. Alors que la science consiste selon moi à s’affranchir de l’immédiateté trop évidente. Ce qui est figé semble suspect dans les sciences : les sciences évoluent vers des modèles explicatifs de plus en plus précis et, si possible, unifiants (bien que ça ne soit pas le cas et que ça ne le sera peut-être jamais : l’unité est un concept ancestral qui nous hante mais qui n’a peut-être pas sa place en sciences). Les théories évoluent, sont modifiées, souvent sont incompatibles lors de révolutions importantes. Pas de progrès cumulatifs. C’est en tous cas ma position épistémologique.
    Faut-il connaitre par cœur tous les films et tous les tableaux pour parler esthétique ? Les artistes sont-ils les mieux placés pour parler esthétique ? Pas sûr. C’est en tous cas hautement contestable. Tu exagères mes arguments et tentes d’imposer la supériorité de ta thèse en développant une argumentation ad hominem. Ce n’est rationnellement pas recevable. Bien évidemment qu’il faut rester critique en lisant des auteurs (ou des scientifiques !). Cela n’empêche pas de se reposer sur leurs théories lorsqu’elles sont pertinentes et finement argumentées. Par ailleurs, l’argument du « tu n’y connais rien en philo » servait juste à répondre pour la forme à « tu n’y connais rien en sciences ». Il est évident que la science a besoin de la philo et inversement. N’est-ce pas déjà nier cela que de dire que la science permet de tout expliquer en réduisant le réel à du physico-chimique, aux atomes et leurs propriétés ?

    Les sciences traitent du monde réel (on est d’accord) mais développent des symboles abstraits pour l’appréhender, symboles qui sont et seront toujours historiques. Le passé nous enseigne cela. Rien ne permet de dire, si l’on s’extrait du stade actuel des sciences et si l’on regarde en arrière, que notre savoir actuel ne sera pas modifié en profondeur. On a des théories plus plus abouties qu’avant (on est d’accord sur ce point) mais pourquoi le futur n’apporterait-ils pas des révolutions scientifiques profondes comme nous en avons déjà connues ces derniers siècles.

    Pour moi, l’existence de la liberté et la culture « prouvent » que tout ne se réduit pas à du physico-chimique !!! Depuis Descartes, on peut distinguer substance étendue et substance pensante (même si la notion de substance est insatisfaisante). Par définition, la science réduit le monde à du physico chimique : c’est une exigence méthodologique (principe d’objectivité). Mais (voir beaucoup plus haut), méthodologie et ontologie sont deux choses différentes. Une part du monde se laisse effectivement comprendre selon la perspective de la science. Mais certains phénomènes ne sont pas l’objet pas l’objet exclusif des sciences dures : on en revient sinon au réductionnisme, croyance métaphysique qui se distingue des théories scientifiques au sens méthodologique.

    Puisque tu n’as pas répondu à beaucoup de mes questions, je te laisse d’abord répondre à ta question (reformulée) : comment « prouves-tu » que tout le réel peut être expliqué et surtout expliqué de manière suffisante et satisfaisante par les seules sciences dures ?

     
  15. Troll de Mantes

    11 juin 2010 à 23:30

    Je trouve amusant que ce soit toi qui affirme une thèse « exotique » (les atomes n’existent pas) et que ce soit à moi de prouver ma thèse… Les observations prouvent l’existence des atomes. Mais comme tu affirmes qu’il n’y a pas d’observation de la réalité… Cela devient difficile.
    « Tous ces sens de l’atome sont-ils compatibles les uns avec les autres, du point de vue de chaque corps ? » Qu’est-ce que cela veut dire (« du point de vue de chaque corps ») ? Il n’y a pas de « sens de l’atome » ! Il y a des modèles compatibles avec différentes théories qui se complètent. Ces l’ensemble des différents modèles quirendent compte de l’atome. « Dire que l’atome, çe n’est qu’un constat de la réalité, c’est méconnaitre profondément la science ». Tu as raison. Seuls les philosophes, ces grands penseurs savent ce qu’est la science ! Je te renvoie aux critiques de Khun http://fr.wikipedia.org/wiki/La_Structure_des_r%C3%A9volutions_scientifiques#Critiques (pour Bachelard, je n’ai pas vraiment cherché). Ne vois-tu pas que tu es également enfermé dans ce que tu dénonce ? Tu es prisonnier de ton paradigme ! Pour ma part, je suis prêts à accepter ton point de vue (sincèrement), mais je ne trouve, dans ton discours, aucun argument pour le démontrer. Etant donné que c’est toi qui avance une thèse exotique, il me semble normal que ce soit à toi de la démontrer. « Effectivement, l’expérience a notamment pour but de valider des théories ou des hypothèses. Mais elle ne fixe rien dans le marbre. » C’est la base de la science que de toujours être prêts à remettre en cause les théories et les hypothèses. Faut-il pour autant remettre en cause toutes les observations ? Tu n’acceptes pas que l’on « observe » les atomes. La science prouve l’existence des atomes – je suis d’accord que cette preuve ne peut être acceptée qu’avec une connaissance approfondie de la physique. Mais comme nous ne parlons pas de science, mais de l’idée que l’épistémologue se fait de la science, l’objet même de la science est sans importance ! Je ne réfuterai pas l’idée de paradigmes incomensurables, parce que je ne sais pas ce que c’est et que d’autres grands penseurs ont du le faire bien mieux que je ne le ferrai.
    Je pense que toute cette discussion gagnerait grandement en s’appuyant sur des exemples précis. Nous avons eu l’éther. Ces meta discussions sont vides de sens pour celui qui n’est pas philosophe… « Il est évident que la science a besoin de la philo et inversement. N’est-ce pas déjà nier cela que de dire que la science permet de tout expliquer en réduisant le réel à du physico-chimique, aux atomes et leurs propriétés ? » Je crois (du verbe croire) que tout est explicable par la nature physico-chimique. Je ne crois pas que la science puisse tout prévoir, tout expliquer… Il y a une nuance fondamentale.
    L’histoire des sciences montre au contraire que le corpus scientifique s’affine, se précise et n’est plus remis en question. Seules les théories récentes, incertaines ou non prouvées conservent un statut de paradigme pouvant être remis en question. « On a des théories plus plus abouties qu’avant (on est d’accord sur ce point) mais pourquoi le futur n’apporterait-ils pas des révolutions scientifiques profondes comme nous en avons déjà connues ces derniers siècles. » Une révolution scientifique n’est pas une remise en cause complète du corpus scientifique. C’est plutôt une précision : exemple de la mécanique quantique vis à vis de la mécanique newtonienne.
    « Pour moi, l’existence de la liberté et la culture “prouvent” que tout ne se réduit pas à du physico-chimique !!! » Il me semble que ce serait plutôt prouver que tout ne se réduit pas à du physico-chimique qui prouverait l’existence de la liberté. Je ne pense pas que l’exitence de la liberté ait jamais été prouvée. Si tout ne se réduit pas à du physico-chimique, qu’est-ce que cette réalité qui n’est pas physico-chimique ? S’il s’agit de quelque chose qui échappe à la science, nous pouvons affirmer que son « existence » ne peut qu’être de l’ordre de la croyance. On ne pourra donc jamais prouver que le réel ne se réduit pas à du physico-chimique.
    « Puisque tu n’as pas répondu à beaucoup de mes questions, je te laisse d’abord répondre à ta question (reformulée) : comment “prouves-tu” que tout le réel peut être expliqué et surtout expliqué de manière suffisante et satisfaisante par les seules sciences dures ? » Je fais beaucoup d’effort pour tenter de répondre à tes questions et je pensais y parvenir. Une grande partie de ton discours ne fait pas sens pour moi. Mais je peux te renvoyer la remarque. Je ne peux pas prouver que « tout le réel peut être expliqué et surtout expliqué de manière suffisante et satisfaisante par les seules sciences dures ». Cela suffit-il pour prouver que les atomes n’existent pas ? Comment prouves-tu que les atomes n’existent pas ? Autrement dit, comment prouves-tu que les observations scientifiques sont des artéfacts ?

     
  16. Pierre

    12 juin 2010 à 11:47

    Ma thèse n’est pas exotique. Ce n’est pas parce que tu n’es pas habitué et adepte de cette vision qu’elle est exotique. Au contraire, je sais de mon côté que le réductionnisme n’est pas exotique car je connais bien cette position théorique et métaphysique. Je vais donc postuler que je n’ai pas exposé assez clairement ma thèse et qu’un accord est possible, que finalement tu n’es pas réductionniste. Reprenons, afin que ton âme errante soit remise sur le droit chemin ^^

    Quand je dis que les atomes n’existent pas, je dis que la manière dont la part de la réalité qui se laisse découpée comme atome n’est pas identique à la description théorique qu’en font les sciences dures. Car observer un atome (en sciences), ce n’est pas juste regarder le « réel » : c’est tester la valeur de theories. Un atome, en sciences, ce n’est pas le constat de « l’existence » d’un objet. C’est un objet scientifique ayant certaines propriétés, ayant certaines caractéristiques. Ces caractéristiques permettent d’expliquer des changements d’états du monde, des liens causaux entre certains phénomènes, etc. Depuis le début je dis que ce concept correspond bien à quelque chose dans le réel. Mais tu te trompes si tu penses que la science nomme atome un simple constat empirique, un simple fait non questionné et non construit.
    Si on demande ce qu’est un atome à un scientifique, il ne va pas sortir une photo ou une représentation basée sur une « observation » dans un accélerateur et se contenter de dire : c’est ça. Ou alors, son explication ne serait pas scientifique. Nous pouvons, j’espère, convenir de ce point.

    Surtout « l’observation » en accélérateur d’un atome ne « prouve » pas la théorie sous-jacente. Depuis quand une expérience prouve une théorie ? Ou alors nous n’avons pas la même conception de la preuve ni de la science.

    « atome » en science n’a pas le même sens que « chaise » dans l’observation empirique, naive et immédiate. Ou alors tu te « bokdanovises ». Je pense en fait que tu ne comprends pas ce que je pense car tu t’es arrêté sur les termes volontairement provocateurs « les atomes n’existent pas » sans faire preuve de charité interprétative. Bien sûr que le réel se laisse diviser, se laisse examiner vers l’infiniment petit. Mais l’atome EN SCIENCE n’est pas une simple observation : c’est dire autre chose que « cette table est devant moi ». Je pense qu’on est d’accord sur ce point.

    Des lors, en quoi est-il exotique de dire que « atome » est un objet scientifique, objet qui peut amené à être modifié voire à perdre toute pertinence dans un stade futur de la science. Dans ce cas, l’atome n’existera plus dans les sciences et ne préservera qu’un sens populaire et totalement affaibli qui n’aura rien à voir avec sa richesse actuelle au sein des sciences dures. L’atome (au sens scientifique, car c’est un concept scientifique) n’existe pas dans le réel : c’est un concept théorique à la portée explicative actuellement gigantesque. Pour un scientifique, un atome n’est pas une simple observation. C’est un noeud conceptuel, autour duquel se déploie tout un tissu. Sorti de ce tissu, l’atome n’est plus rien. Il est une évidence illusoire (même si on l’observait grâce à un microscope optique extrêmement puissant).

    Donc pour énoncer différemment ma thèse : l’atome comme objet doté de certaines propriétés et permettant une explication scientifique des phénomènes reste un objet scientifique. Cet objet est historiquement construit, le fruit d’un travail d’abstraction intellectuelle : ce n’est pas un objet du monde réel. Dire qu’atome scientifique, c’est la même chose qu’atome perceptif, c’est avoir une conception dégradée de la science et méconnaître tout le travail humain mis en oeuvre pour construire les symboles scientifiques. Encore une fois, « atome » en science, ce n’est pas juste un constat empirique (on sort sinon de la science), un objet « réel » comme l’est la chaise. Si tu me dis que l’atome et sa conception sont observables et donc prouvées par l’observation, je pense qu’il est urgent qu tu (re-)lise Kuhn et Bachelard. Tu y trouveras une kyrielle d’exemples historiques et d’illustrations scientifiques de ce que j’avance.

    Effectivement, Kuhn est relativiste mais pas au sens péjoratif et naïf du terme. Il base ce relativisme sur une étude de l’histoire des sciences et théorise sa vision avec les concepts de paradigme (incommensurable avec un autre), de science normal et de science révolutionnaire. Je pense que dire (comme le dit la première critique dans le lien fourni) qu’il n’y a pas de critères objectifs pour juger un paradigme est une mauvaise lecture de Kuhn. Cf. p279 de La structure… (Champs Flammarion, 1983). Kuhn croit bel et bien au progrès scientifique. Mais il n’a pas l’illusion de croire que la science a une portée ontologique :

    « Il n’existe, me semble-t-il, aucune possibilité d’expliciter le sens d’une expression comme « ce qui s’y trouve réellement », en dehors d’une théorie particulière ; la notion d’une adéquation entre l’ontologie d’une théorie et sa contrepartie réelle dans la nature me semble par principe une illusion […]. Par ailleurs, en tant qu’historien, je suis frappé par le caractère peu plausible de ce point de vue. Je ne doute pas, par exemple, que la mécanique de Newton ne soit une amélioration par rapport à celle d’Aristote, ou que celle d’Einstein ne soit meilleure que celle de Newton en tant qu’instrument pour la résolution des énigmes. Mais je ne vois, dans leur succession, aucune direction cohérente de développement ontologique. Au contraire, par certains caractères importants – pas par tous -, la théorie générale de la relativité d’Einstein se rapproche davantage de celle d’Aristote qu’aucune des deux ne se rapproche de celle de Newton. Je comprends que l’on soit tenté de qualifier cette position de relativiste, mais je pense quand même que ce terme est inexact ». (idem, p280).

    Les deux extraits évoqués sont issus de la postface, rédigée en 1969, afin de répondre à certains malentendus et certaines erreurs d’interprétation.

    Je crois bel et bien en la puissance explicative des sciences dures, je crois que la plus grande part du monde peut être appréhender scientifiquement. Mais je sais aussi mettre des limites à la science. Je suis capable de penser par moi-même, d’agir selon des principes que j’ai interrogés rationnellement et librement choisis : je suis un être capable de liberté, c’est-à-dire capable de m’extraire en partie du déterminisme physico-chimique (approche la plus rationnelle actuellement pour appréhender le monde et décrire la succession des phénomènes). Si tu ne te crois pas libre, c’est ton choix. Mais arrête la politique, arrête d’écrire et réfugie toi dans la consommation et le libéralisme : tu seras alors effectivement un simple animal guidé par le plaisir et donc majoritairement guidé physico-chimiquement. Par tes actes, tu postules que la liberté existe et que l’on peut changer le monde en véhiculant des idées. Les idées, même si elles supposent un support physico-chimiques, sont-elles determinées absolument par ce support ? Un peu exotique comme theorie 😉 Bien des scientifiques n’y souscriraient pas !

    Tu balaies d’une simple geste la valeur, le sens, tu renies la portée explicative et compréhensive des sciences humaines.

    Même Saint-Thomas (Somme théologique) argumente en faveur de la liberté humaine !!! Pourtant, ta conception scientifique du monde est d’essence religieuse comme lui. Déterminisme, explication a priori de tout ce qui arrive… Dans un monde créé par Dieu, Saint-Thomas arrive néanmoins à élaborer une défense de la liberté de l’homme ! Voir ci-dessous :

    « L’homme est libre ; sans quoi conseils, exhortations, préceptes, interdictions, récompenses et châtiments seraient vains. Pour mettre en évidence cette liberté, il faut remarquer que certains êtres agissent sans jugement, comme par exemple, la pierre qui tombe ; il en est ainsi de tous les êtres privés du pouvoir de connaître. D’autres agissent d’après une appréciation mais qui n’est pas libre ; par exemple, les animaux ; en voyant le loup, la brebis saisit par un discernement naturel mais non libre, qu’il faut fuir ; en effet, ce discernement est l’expression d’un instinct naturel et non d’une opération synthétique. Il en est de même pour tout discernement chez les animaux. Mais l’homme agit par jugement, car c’est par le pouvoir de connaître qu’il estime devoir fuir ou poursuivre une chose. Et puisqu’un tel jugement n’est pas l’effet d’un instinct naturel, mais un acte de synthèse qui procède de la raison, l’homme agit par un jugement libre qui le rend capable de diversifier son action. En effet, à l’égard de ce qui est contingent, la raison peut faire des choix opposés.
    Or, les actions particulières sont en un sens contingentes, aussi le jugement rationnel peut les apprécier diversement et n’est pas déterminé par un point de vue unique. Par conséquent, il est nécessaire que l’homme soit doué du libre-arbitre du fait même qu’il est doué de raison. »

    Je cite Saint-Thomas alors que je suis athé, justement pour appuyer l’idée que même avec une conception déterministe du monde, on peut extraire l’humain de cette sphère. Je te laisse par ailleurs lire le point A du lien ci-contre : http://sergecar.perso.neuf.fr/cours/liberte2.htm

    Tu te places sur le champ des sciences pour prouver l’existence de la conscience : c’est une contradiction dans les termes. Puisque les sciences (pour la énième fois) postulent, afin de gagner en puissance explicative et prédictive, que tout se réduit au physico-chimique. C’est grâce à cela que la science a progressé. Mais tu ne peux pas dire ONTOLOGIQUEMENT que par l’adoption de ce postulat, toutes les couches du réel se réduisent réellement à la vision de la science. Enfin tu peux, mais nos deux mondes ne pourront pas communiquer longtemps de manière intéressante…

    Tu as le droit de dire que la culture (ce n’est pas du physico-chimique) n’existe pas, que les gens s’aiment et divorcent selon des lois purement scientifiques (nos actions, nos erreurs ne sont basées que sur nos gènes et notre composition chimique), que nous ne sommes que des amas d’atomes déterminés et guidés par de purs phénomènes chimiques. Au passage, c’est quoi une représentation intellectuelle, une idée, un concept ? Je suis d’accord qu’il y a un support neuronal, un certain état électrique (que l’on peut observer scientifiquement) ? Mais ce n’est que cela ? La culture, qu’est-ce donc ? Les valeurs morales, qu’est-ce donc ? La création artistique, qu’est-ce donc ?

    Je pense avoir assez précisé ma position pour avoir répondu à ton dernier paragraphe (dans le sens où la science, ce n’est jamais une simple perception immédiate).

    Si je résume ta position (tu me corrigeras si je me suis trompé) : tout est déterminé par des lois que les sciences dures cherchent à mettre au jour. Constantes, lois, théories : tout peut passer à la moulinette des sciences dures. Qui plus est : tout ne peut être véritablement expliqué QUE par les sciences dures. Car tout est REELLEMENT atomes, c’est-à-dire REELLEMENT, tel que le postule l’atomisme, avec des réactions et des comportements réels tels que le disent la (les ?) physique et la chimie. Il y a, au pire, encore quelques points à préciser ; mais grosso modo, nous avons tellement progressé et développé tellement d’outils techniques que nous nous approchons d’une explication totale et suffisante de l’univers (dont l’homme et ses échanges et productions). Nous espérons donc un jour avoir une théorie scientifique qui suffise à expliquer comment le monde s’est créé, comment s’enchainent les phénomènes, comment le vivant est apparu, pourquoi l’homme ne pouvait pas ne pas apparaître, pourquoi la conscience est apparu. Puis, à partir de là, comment se sont enchainées les idées (de manière nécessaire), pourquoi au quotidien nous pensons telle ou telle chose. Bientôt, nous pourrons prévoir pourquoi tel ou tel enfant deviendra délinquant. Nous supprimerons les tribunaux car nous pourrons savoir qui sera éternellement irrécupérable et qui reviendra sur le « droit » chemin, car tout sera prédictible (les hommes ne sont pas libres !). Tout est gène, tout est physico-chimique. La seule explication du monde valable est à chercher dans les sciences dures. Nous remplacerons les artistes par des machines car nous trouverons les lois qui expliquent pourquoi nous aimons (c’est-à-dire sommes dans un certain état physico-chimique) tel ou tel tableau, tel ou tel film, telle ou telle musique. Il n’y a pas plusieurs « couches » de réalité, il n’y a qu’une perspective VRAIE et valable sur le monde : la science. Philosophie, sciences humaines sont des illusions non fondées car des discours non prouvés par les méthodes des sciences dures. La liberté est une illusion métaphysique. D’ailleurs, les mots actuellement tapés sur mon ordinateur ne sont-ils pas déterminés par un stade antérieur de la matière ? Tout n’est que matière. La conscience (comprise comme représentation immatérielle, n’est qu’une sorte de musique d’accompagnement d’un concert joué par nos corps, leurs atomes et leurs relations). Cette vérité s’imposera un jour à tous.

    J’annonce juste les grandes lignes de ma vision du monde : le monde est analysable selon plusieurs couches, ce qui explique l’existence de plusieurs types de sciences (dures et humaines) qui se complètent. Bien sûr, la physique et la chimie doivent étudier la pensée. Mais réduire la pensée à leurs théories est du réductionnisme ( = métaphysique si ce réductionnisme va au-delà de la simple méthode). Je ne peux recevoir les arguments de « faits » pour défendre cette thèse car justement il ne s’agit plus de faits puisque ces faits ne sont conditionnés que méthodologiquement. Je ne peux pas te montrer que ta conception est ontologiquement fausse si tu ne parviens pas à distinguer méthodologie et ontologie au niveau scientifique. Mais encore une fois, libre à toi d’être « réaliste » (position dite de « réalisme ») : c’est une approche métaphysique défendable… mais non pas prouvable par les sciences 😉

    L’avantage de ma thèse est qu’elle permet de rendre justice à l’existence DE FAIT de différents types de sciences, de certaines pratiques humaines (les jugements moraux, les jugements judiciaires) qui sont totalement insensés sinon. Finalement, si tu penses que je critique les sciences dures en sapant leurs briques essentielles (ce qui n’est pas le cas puisque je défends que l’atome est un magnifique objet scientifique qui prends place au sein de théories explicatives et prédictives de haute volée), je pense que tu critiques la plus grande part des autres activités humaines ! Je ne fais que relativiser le sens des objets scientifiques sans en diminuer la valeur ; tu vas jusqu’à dire que tout ce qui n’est pas fidèle au discours des sciences dures est une illusion.

    Je pense que nous illustrons parfaitement l’image du canard-lapin 😉 J’espère en tous cas avoir réussi à redéployer ma conception de manière plus claire, puisque c’est le but de cette discussion.

     
  17. Troll de Mantes

    13 juin 2010 à 15:20

    Nous sommes d’accord : je n’avais pas compris ta thèse. J’avais préparé une longue réponse, mais je vais finalement faire court sur les points de ton argumentation, parce que j’ai toujours autant de mal à comprendre ce que tu écris (je l’affirme haut et fort : je n’ai pas le bagage culturelle !) et ils n’ont finalement aucune importance pour la conclusion.

    1 – Si tu me demandes « qu’est-ce qu’un chien ? » et que je te présente une photo de mon pitbull en te répondant « C’est ça », aurai-je répondu à ta question (en supposant que tu n’est pas la moindre idée de ce qu’est un chien) ? Ce n’est pas parce que tu sais ce qu’est un chien qu’une simple photo suffit à définir le concept « chien ». D’autre part, nous utilisons des appareils de mesures adaptés à la taille de l’objet (?) mesuré. Voir cet intéressant article sur les « photographies » d’atomes : http://etudesphotographiques.revues.org/index264.html

    Pour information, nous n’observons pas les atomes dans des accélérateurs de particules. Cet appareil de mesure est plutôt adapté à l’observation des particules subatomiques. Mais tu as raison, une théorie ne pourra jamais être prouvée, car cela n’a finalement pas de sens, alors que montrer la fausseté d’une théorie en a un. La théorie gravitationnelle de Newton est-elle vraie ou fausse ? Elle est en tout cas une très bonne approximation de la théorie gravitationnelle d’Einstein.

    Puisque je me « bokdanovise » (tiens ! un argument ad hominem ?), je vais avancé un argument digne de leur très grande sagesse (merci de ne pas le prendre trop au sérieux). Cette chaise qui est devant moi n’exsite pas : c’est ce qu’a découvert Néo… Alors que les atomes existent toujours dans la matrice. Le vrai argument tout de suite…

    Plus sérieusement, je te dirais que les atomes ont le même statut que la chaise. On mesure (j’essaie de na plus écrire « on observe ») des propriétés physico-chimique d’un objet que l’on nomme atome. Tu me dis qu’un jour, peut-être, une théorie n’aura plus besoin de la notion d’atome et que l’on frabiquera des instruments de mesure pour lesquels les atomes auront disparus au profit d’autres objets. C’est possible. Mais en quoi cela remet-il en cause l’existence des atomes ? Si j’observe ma chaise avec un caméra thermique, celle-ci disparaît ! Pourtant elle existe toujours. Que le concept d’atome soit dépassé dans une autre théorie ne lui retire pas toute sa pertinence et son existence en tant que phénomène physico-chimique mesurable et mesuré permettant de comprendre, prévoir, agir sur le monde matériel. Encore une fois, les ingénieurs sont bien content d’utiliser les formules de Newton plutôt que celles d’Einstein. J’affirme que les atomes existent parce que je mesures leurs propriétés physico-chimiques.

    Je comprends mieux (du moins je le crois) ce que tu penses. La construction de l’objet scientifique « atome » repose sur des mesures physico-chimique du réel et donc (seras-tu d’accord avec ce donc ?) sur une réalité physico-chimique, que l’on nomme « atome », objet du monde réel. Bien sûr, tu peux tenir la thèse (mais je ne crois pas que ce soit la tienne), qu’un jour notre conception physico-chimique sera remise en cause au profit d’une autre (celle des purs esprits ? celle de la matrice dans un monde non physico-chimique ?), mais c’est un peu « exotique » pour le coup. Si on accepte une réalité physico-chimique, on accepte l’existence des atomes comme phénomène physico-chimique mesurable. Je pense que tu ne peux pas être en désaccord avec ça.

    Concernant Kuhn, je ne peux pas vraiment rentrer dans le débat parce qu’il me dépasse. Mais la citation montre est intéressante au moins sur un point (que je comprends). « Je ne doute pas, par exemple, que la mécanique de Newton ne soit une amélioration par rapport à celle d’Aristote, ou que celle d’Einstein ne soit meilleure que celle de Newton en tant qu’instrument pour la résolution des énigmes. » Le rélativité générale n’a absolument pas remis en cause la théorie de la gravitation de Newton, elle l’a affinée ! Il ne s’agit pas d’une théorie qui viendrait en remplacer une autre (l’éther devant la relativité restreinte), ni en compléter une autre (mécanique quantique et mécanique classique). Dans le premier cas, l’éther était une hypothèse infirmée par la suite, dans le second, il s’agit de deux modèles permettant de rendre compte du réel à des échelles différentes.

    Nous abordons maintenant le point essentiel, que je n’avais absolument pas compris, à savoir que, pour toi, il existe une réalité objective non physico-chimique, dans le style des trois mondes de Karl Popper (http://fr.wikipedia.org/wiki/Karl_Popper#M.C3.A9taphysique_des_trois_mondes) que je viens de découvrir. Cette conception du monde sort, a priori, totalement de la science, mais ce n’est pas certain j’y reviendrai. Elle est donc irréfutable, ce qui ne veut pas dire qu’elle soit vraie ou fausse, si cela a d’ailleurs un sens ici. Tu argumentes : « Si tu ne te crois pas libre, c’est ton choix. Mais arrête la politique, arrête d’écrire et réfugie toi dans la consommation et le libéralisme : tu seras alors effectivement un simple animal guidé par le plaisir et donc majoritairement guidé physico-chimiquement. » C’est l’argument qu’on me sort à chaque fois et que je ne comprends pas. Ce n’est pas parce que le monde est déterminé (thèse irréfutable) que l’homme puisse accéder à sa connaissance complète et calculer l’état futur du système (l’univers) à chaque instant. Je n’arrêterai pas la politique : c’est déterminé (thèse irréfutable). Réalisant que le monde est totalement déterminé, tu peux tout arrêter, te laisser mourrir puisque tu n’es pas libre. Dans ce cas il était déterminé que tu te laisserai mourir. L’important n’est pas que le monde soit déterminé ou pas, mais que l’homme n’ait pas accès à la connaissance de l’état futur du monde. Sa liberté réside dans cette ignorance.

    Je ne renie pas la partie explicative des sciences humaines, mais leur force explicative. Une théorie en sciences humaines est irréfutable, ce qui nuance fortement leur force.

    La position de Saint Thomas, comme la tienne, comme la mienne, est irréfutable… Le débat ne sert qu’a essayer de faire comprendre à l’autre sa conception. Mais aucune conception ne peut-être vraie ou fausse à l’heure actuelle.

    Tu écris : « tu te places sur le champ des sciences pour prouver l’existence de la conscience. » Ce n’est pas exact. Je ne cherche pas à prouver l’existence de la conscience ; je la constate (l’observe) et postule son existence. Ensuite, j’élabore une théorie scientifique faite d’hypothèses expliquant par des phénomène physico-chimiques (puisque scientifique) son existence. Notre point de divergence fondamental est que je postule l’équivalence entre réalité objective et réalité physico-chimique, alors que pour toi, il existe une réalité non physico-chimique. Nous pourrons toujours discuter, j’en suis certain ! ;o)

    Concernant tes interrogations sur l’art, la culture, les idées, les valeurs morale, etc, je pourrai t’exposer ma vision des choses, mais une autre fois. En une phrase, ma réponse est : « des phénomènes physico-chimiques ». Je peux aussi te retourner ces questions, mais je pense que je ne comprendrai pas la réponse…

    Tu résumes bien ma position : il n’y a de réalité objective que physico-chimique (première partie de ton paragraphe : les 5 premières lignes). Mais tu en tire des conclusions que je ne partage pas. Nous sommes très très loin de tout cmprendre et nous ne comprendrons JAIMAIS tout. Jusqu’à quel point pourrons-nous comprendre le monde ? Aucune idée. D’autre part, comrendre comment marche le monde ne signifie pas prévoir son évolution (voir le principe d’incertitude Heisenberg). Nous ne pourrons par exemple probablement jamais prévoir si tel ou tel enfant deviendra un délinquant. Enfin, même si nous savions le comment, nous ne saurions jamais le pourquoi, parce que cette question est hors du champ de la science. « Cette vérité » ne s’imposera donc jamais à qui que ce soit.

    Nous sommes d’accord que mon approche n’est pas « prouvable », il s’agit d’une approche métaphysique écris-tu. Si tu l’écris, c’est que cela doit être vrai. Ton approche est aussi métaphysique alors. Ma thèse est réductioniste ? Ok, si c’est cela. Bien que le terme me paraisse péjoratif, je l’accepte. Comment s’appelle ta thèse ? Je ne parviens pas, effectivement, à distinguer méthodologie et ontologie au niveau scientifique parce que je ne comprends toujours pas ce qu’est une ontologie… D’autre part, je doute que l’on puisse démontrer quoique ce soit en en dehors des sciences, mais je ne me suis pas plus penché sur la question que ça… Donc je doute qu tu puisses me démontrer que ma conception est ontologiquement fausse. Mais je ne comprends pas de quoi on parle là…

    Tu affrimes que ta thèse « permet de rendre justice à l’existence DE FAIT de différents types de sciences, de certaines pratiques humaines (les jugements moraux, les jugements judiciaires) qui sont totalement insensés sinon. » Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire (« rendre justice », « insensés ») ? Ma thèse ne cherche pas à trouver la signification du réel, elle ne cherche aucune finalité au réel, elle se content de le décrire, en usant de modèles. Ma thèse a l’avantage d’être plus simple (mais pas simpliste) pour expliquer complètement le monde.

    Je comprends maintenant l’image du canard-lapin, que j’interprétait uniquement dans un monde physico-chimique…

    Pour conclure. Tu es resté sur le plan philosophique. Je n’ai pas ke bagage culturelle pour débattre sans un minimum d’aide, ce dont tu ne semble pas être conscient. Je n’avais pas compris que ta thèse « les atomes n’existent pas » ne devait pas être interprétée comme une thèse réfutable, mais comme un titre accrocheur pour introduire une position philosophique (métaphysique ?) irréfutable. Nos deux positions, dans le domaine métaphysique se valent puisqu’elles sont toutes les deux irréfutables.
    Ma thèse est donc la suivante : « Il existe une réalité objective entièrement décrite sur le plan physico-chimique ». Selon moi, chercher une réalité autre que physico-chimique (c’est à dire observable, appréhendable par l’homme), c’est un peu comme chercher ce qu’il y a au delà de l’univers ou avant le Big Bang. Dans le cadre de ma thèse, les atomes existent en tant que phénomène physico-chimique mesurable. Penser qu’une nouvelle théorie pourrait remplacer la théorie physico-chimique est une erreur parce qu’elle aboutirait à la remise en cause de l’existence d’une réalité physico-chimique. (Je sens que tu ne va pas être d’accord avec ça.)
    Selon ta thèse, il existerait une réalité objective non physico-chimique (en plus de la réalité physico-chimique). Si tel est le cas, ces deux réalités interagissent et la science devrait, un jour, être capable d’observer ces interactions… D’autre part, la science est susceptible d’expliquer sur un plan purement physico-chimique de plus en plus de phénomènes que tu intègre dans le monde non physico-chimique (sentiment, art, culture, idée, etc), ce qui grignotera progressivement le domaine interprétatif de cette réalité non physique, comme cela se produit depuis des siècle avec la religion.
    Selon moi, on ne peut débattre de l’existence ou de la non existence des atomes que dans le cadre d’une réalité physico-chimique (même si cette réalité ne recouvre pas toute la réalité selon ta thèse). La seule question qui reste est donc : une nouvelle théorie scientifique peut-elle remettre en cause les fondements de la théorie physico-chimique. C’était probablement ta question initiale, que je comprends enfin (mieux vaut tard que jamais).

     
  18. Pierre

    13 juin 2010 à 21:26

    Je reprends ton commentaire, en le suivant si possible chronologiquement :

    Commençons par le lien relatif à l’illustration « photographique » de l’atomisme. Il s’agit donc d’une illustration de la théorie. Il est intéressant de noter qu’il parle dans son article de rhétorique. C’est particulièrement troublant. En effet, la rhétorique c’est l’art oratoire, utilisé par exemple par la sophistique. C’est l’art de persuader. La « photo » de l’atome sort donc du discours scientifique ici : elle doit juste parler au sens commun : « de telles images sont lisibles sans autre connaissance préalable, alors que les mesures habituelles d’objets microscopiques sont indirectes et difficiles, et leur interprétation exige évidemment des connaissances théoriques, techniques et pratiques très pointues. ». Ici, l’auteur (professeur de physique à Polytechnique). Il me semble que la conclusion dénote bien que l’auteur est conscient du caractère trompeur de genre d’élement : « la représentation fait croire que sa lecture se passe d’autres référents. Les référents étant par exemple la description de l’appareil de mesure ou les hypothèses nécessaires au traitement des données. Il s’ensuit une impression de réalisme très forte mais parfaitement injustifiée. Avec la nécessité croissante d’informer les non-spécialistes (que sont notamment les pourvoyeurs de fonds) et la multiplication des articles de vulgarisation, on voit apparaître en masse ce type d’arguments “graphiques” extrêmement convaincants.

    Dans le débat sur la validité de la représentation atomique et sur la preuve de l’existence des atomes (ou de tout objet quantique), ces images doivent être utilisées avec beaucoup de précautions. La microscopie à l’échelle atomique n’apporte pas plus, sur le caractère réaliste des objets qu’elle exhibe, que les autres types d’expériences accumulées tous les jours dans les laboratoires. L’interprétation des résultats, longue et difficile, est toujours sujette à controverse, ne l’oublions pas. ». L’auteur ne défend donc pas, in fine, une position réaliste. La photo dont il parle ne prouve pas la réalité de l’objet. Merci pour cet argument 😉

    Mais tu as raison, une théorie ne pourra jamais être prouvée, car cela n’a finalement pas de sens, alors que montrer la fausseté d’une théorie en a un. » => nous sommes effectivement d’accord

    Juger de la valeur des sciences humaines appartient à l’épistémologue, non au scientifique, tu es d’accord là-dessus j’imagine. Il conviendra donc, cela pourrait être l’occasion d’un autre débat, d’appuyer cette thèse selon une perspective épistémologique. C’est en tous cas tout sauf une thèse évidente. De nombreux problèmes sont en jeux dans l’étude de cette question. Nous y reviendrons peut-être.

    J’ignore ton passage sur Néo, étant donné que nous sommes d’accord sur la position à tenir… 😉

    Je vais directement en arriver à ce que je décèle dans ta thèse (le réalisme de l’atomisme pour la désigner pompeusement). Tu confonds, selon moi l’approche scientifique avec la perception dite naïve, immédiate. Philosophiquement, il y a en quelque sorte deux écoles diamétralement opposées. La science procède de connaissances « a priori », indépendantes de la matière et des impressions sensorielles que nous en avons. De l’autre côté, les objets sont tels qu’ils nous apparaissent et, par excellence, tels que la science nous les donne « à voir ». Einstein nomme cette deuxième position le « réalisme simplet », alors que la première position est dite « assez aristocratique ». Au quotidien, nous nous contentons de la deuxième position, « illusion assez plébéienne ». Il en va de notre survie, ce qui explique la force de cette position. Einstein cite Russel : « Nous commençons tous avec le réalisme naïf, c’est-à-dire avec la doctrine que les objets sont tels qu’ils paraissent […]. L’observateur qui prétend observer une pierre observe, en réalité, si nous voulons ajouter foi à la physique, les impressions des pierres sur lui-même. C’est pourquoi la science paraît être en contradiction avec elle-même ; quand elle se considère comme étant extrêmement objective, elle plonge contre sa volonté dans la subjectivité. Le réalisme naïf conduit à la physique, et la physique montre, de son côté, que ce réalisme naïf, dans la mesure où il reste conséquent, est faux. Logiquement faux, donc faux ». Après une analyse rapide de Hume et Kant, Einstein énonce alors sa conviction (éclairée par sa démarche de scientifique) : « Les concepts apparaissant dans notre pensée et dans nos expressions de langage sont – d’un point de vue logique – pures créations de l’esprit et ne peuvent pas provenir inductivement des expériences sensibles. Ceci n’est pas si simple à admettre parce que nous unissons concepts certains et liaisons conceptuelles (propositions) aux expériences sensibles si profondément habituelles que nous perdons conscience de l’abîme logiquement insurmontable entre le monde du sensible et celui du conceptuel et de l’hypothétique. Ainsi, incontestablement, la série des nombres entiers marque une invention de l’esprit humain, un instrument créé par lui pour faciliter et ordonner certaines expériences sensibles. Il n’existe aucune possibilité de dégager ce concept de l’expérience sensible elle-même […]. Je ne vois pas de danger « métaphysique » à accueillir l’objet (objet au sens de la physique) comme un concept indépendant dans le système lié à la structure spatio-temporelle lui appartenant ». => Albert EINSTEIN, « Comment je vois le monde », Flammarion, 1979, pp 38-44.

    Pour Einstein, donc, aucun problème à admettre que les objets scientifiques (ex : l’atome) n’existent pas au sens où nous l’entendons habituellement (ex : cette table, dans le cadre de la perception naïve).

    Derrière notre débat, il y a la conception même de la conscience et de la connaissance qui est en jeu : seul une perspective épistémologique est apte à aborder ce problème. Car nous sommes à un niveau méta-scientifique. Je serais sinon totalement incapable d’aborder le problème !!!!

    Concernant Einstein, il me semblait que sa théorie (différente de celle de Newton) était plus pertinente à un certain niveau de grandeur (macroscopique ?) et donc rendait la théorie newtonienne fausse si, comme lui, on la rendait universelle (quelle que soit l’échelle). Si je comprends bien, tu comprends le progrès scientifique comme cumulatif (même s’il n’est pas toujours continu) : dans ce cadre, Einstein améliore Newton dans un certain cadre, mais ne l’invalide pas. Tu es d’accord pourtant que la théorie Newtonnienne ne convient pas pour étudier le monde à une certaine échelle (donc est remplacée par la théorie d’Einstein) ? Peut-être la science accouchera-t-elle d’une théorie unifié / unifiante pour l’échelle micro et macroscopique ? Dans ce cadre, les deux théories seront invalidées, non ? J’avoue ici que tu pourras avancer plus d’arguments que moi.

    Concernant les positions épistémologiques, il y a par exemple la logique qui permet de préférer une thèse plutôt qu’une autre (comme l’avance par exemple Russel). Ou alors tout se vaut et tu défends une position relativiste. Ce n’est pas parce que la manière de trancher n’est pas scientifique (au sens de sciences dures) que toutes les positions se valent. Pourquoi nier toute valeur à la discussion philosophique ????!!! Pourquoi rejeter, plus globalement, les sciences « humaines » ? L’étude de la pensée montrer que certaines thèses ont du être abandonnées car critiquées par de bons arguments. En même temps, il est vrai qu’un problème philosophique traverse l’histoire de l’homme : on ne le résout pas au sens scientifique (sciences dures). Où est le problème ? Pourquoi cette attirance pour la « vérité » immuable ? Avant d’ailleurs de se jeter dans la science, ne faut-il pas interroger, en plus de la théorie de la connaissance adoptée, l’attirance pour ce qu’on nomme habituellement « vérité » ? Et s’il s’agissait d’une illusion ? Ces formulations lapidaires ont juste pour but de montrer que la discussion est très très très loin d’être simple.

    Si la réalité n’est pas telle que les sciences dures le disent (Cf. position d’Einstein, Kuhn, Bachelard, Kant, Nietzsche… et moi à mon petit niveau), pourquoi vouloir réduire la vision du monde à celle des sciences dures ? L’objectivité des sciences (qui est une illusion de l’empirisme naïf : cf. plus haut) étant erroné (ce n’est qu’un principe et non une réalité, un fait ontologique), pourquoi réduire le monde à cette seule théorie ? C’est ici l’occasion de préciser le sens de « ontologie » : c’est, grosso modo, une théorisation de ce qui existe dans le mondre, un discours sur le « réel ». Tu comprendras, selon mon argumentation, que l’ontologie est une discipline « métaphysique » : au-delà de ce que peut dire la physique. A la limite, l’ontologie doit se réduire à la phénoménologie (étude de ce qui apparaît) au niveau de la conscience. Une réelle ontologie est impossible. Par conséquent, tu dois mieux comprendre désormais ce que j’entends par des formulations telles que « l’atome n’existe pas ».

    Si les sciences dures elles-mêmes n’accèdent pas au « réel », à l’être (en langage métaphysique), pourquoi refuser de multiplier les perspectives sur le monde pour mieux l’appréhender. Je ne te parle pas d’accepter l’alchimie ou l’astrologie : aucun rapport. Je te parle juste d’accepter que le réel se laisse aborder selon différentes perspectives, ce qui laisse la place à différentes sciences, chacune avec leurs objets et leurs théories. Si par principe les sciences dures refusent la causalité de la pensée (car tout n’est que physico-chimique), il n’en va pas de même en psychologie, sociologie, philosophie, histoire… etc.

    Refuser cette pluralité de perspectives, c’est réduire le « réel » à une seule de ses dimensions, d’où le terme de réductionnisme. Il y a effectivement une connotation péjorative car c’est « réducteur », « limitatif ». Expliquer le comportement humain par le physico-chimique, c’est dire que la cause première est toujours physico-chimique (ex : un signal électrique). Je suis d’accord qu’il y a des signaux électrique (que l’on « observe » d’ailleurs) lors des pensées conscientes par exemple. Maintenant, dire que ce qui cause par exemple une action (faire du sport), c’est un certain état électrique du cerveau et que c’est la seule explication à admettre ce n’est plus de l’ordre de la science. Personnellement, je pense (de manière très conventionnelle) que c’est la représentation qui a causé en tant que cause première l’action (faire du sport). Cela s’est traduit par des états physico-chimiques bien particuliers, mais ceux-ci n’ont pas déterminé à l’origine la mise en mouvement. Ceci est un parfait exemple des différentes couches de la réalité.

    Ton argument de la simplicité (philosophiquement : le rasoir d’Okham) n’est pas recevable à ce niveau.

    « Tu es resté sur le plan philosophique » : je me suis au contraire « élevé » à la philosophie ;). Que nul n’entre ici s’il n’est géomètre était-il écrit à l’entrée de l’Académie, l’école philosophique de Platon : les mathématiques conduisent à la philosophie car ce sont une première forme d’abstraction permettant ensuite de mieux assimiler le développement d’une pensée abstraite, conceptuelle.

    Je ne reprendrai pas dans le détail ton dernier paragraphe (trop) dense car je pense qu’un certain nombre d’idées avancées est déjà critiqué par la présente argumentation. Les thèses philosophiques et épistémologiques sont réfutables : tout ne se vaut pas, à moins de souscrire au relativisme et / ou au scepticisme total, ce qui n’est pas mon cas. Je crois en la force de la raison et en l’argumentation. Je présuppose qu’e l’on peut toujours peser le pour et le contre de pensées opposées. Je crois au perspectivisme bien pensé : il y a toujours des choses à prendre dans les différentes vues sur le monde. Notre dialogue est une preuve, je pense, que l’on apprend toujours beaucoup de l’autre.

    Tu comprendras, je pense, que je ne souscris pas à la sorte de grignotage progressif de la science sur l’ensemble du réel que tu crois voir. Le réel en entier est interprétable scientifiquement : je suis d’accord. Mais il l’est aussi selon d’autres perspectives. Scientifiquement, tu dois présupposer que seul l’étude du physico-chimique est pertinent : c’est un principe méthodologique. Si tu commences à postuler que des esprits ou des forces occultes agissent au sein de la matière, tu entraves le développement de la science. Après, le discours scientifique reste symbolique, à un tout autre niveau que le niveau « réel » (même si tout nous pousse à croire le contraire, d’où la violence de ce débat et la force que nous devons déployer pour assoir nos arguments respectifs : toi pour défendre ce qui te semble pourtant évident et non critiquable ; moi, pour essayer de te faire abandonner cette illusion). Il faut accepter que d’autres systèmes symboliques sont pertinent pour découper le réel en concept et tenter d’établir des liens entre certains phénomènes. Cela reste des disciplines parfaitement rationnelles. Elles sont juste sur un autre plan que les sciences dures. Scientifiquement, il faut se limiter à l’analyse des phénomènes physico-chimiques pour expliquer l’art. C’est une obligation au niveau de la méthode. Mais un scientifique n’a pas à étendre cette vision au niveau ontologique, c’est-à-dire à dire que l’émotion esthétique n’est effectivement que la manifestation d’enchainements physico-chimiques. Il reste à côté de ce point de vue, un autre point de vue, non pas contraire mais complémentaire.

    Imagine que l’on observe, en bons extraterrestres, une voiture se rendant d’un point A à un point B, sans pouvoir différencier la voiture de son conducteur. Nous analyserons alors le déplacement comme la conséquence des réactions physico-chimiques à l’oeuvre dans le moteur, qui entraînent alors le mouvement des roues, ce qui exerce une propulsion de la voiture sur la route (je suis très mauvais en description scientifique !!!!). On peut rajouter le phénomène de la combustion, etc… Mais pourquoi la voiture va de A à B ? Parce que, par exemple, un être humain a décider de rendre visite à sa mère car c’est la fête des mères. Il y a une raison historique à cela : cela remonte par exemple à des fêtes grecques, en l’honneur de Rhéa… etc. Par ailleurs, sociologiquement, certaines statistiques peuvent être établies (pure spéculation !) pour déterminer que selon telle ou telle catégorie sociale, cette personne est soumise à une force coercitive sociale. Au niveau psychologique, on doit pouvoir expliquer pourquoi cette personne est attachée à sa mère et choisi donc de se rendre chez elle. Au niveau philosophique, on postulera par exemple qu’au-delà de ces déterminisme, la personne a librement choisi de se rendre chez sa mère. Elle a examiné différentes solutions possible, puis a délibérer en faveur d’une certain actions conformément à certaines représentations.. Bref, un même fait peut être expliqué selon différentes perspectives. Il y a des causes physico-chimiques au mouvement, mais aussi psychologiques, sociologiques… etc.

    Pour répondre à tes dernières lignes, seule l’épistémologie et une théorie de la connaissance peuvent déterminer si les objets scientifiques existent ou pas. Jamais une science prouve l’existence d’un objet. Car elle est profondément abstraite, intellectuelle, conceptuelle. Tout nous fait spontanément penser le contraire. L’évidence n’est cependant pas un critère de « vérité » (et pan ! prends ça dans tes dents Descartes !).

    Avant de repartir dans des arguments / contre arguments à l’infini, que penses-tu de ma thèse générale, à savoir : l’atome est un objet scientifique, donc un objet abstrait, conceptuel qui appartient à une théorie (historiquement construite et donc révisable), théorie qui n’analyse le réel que selon une perspective déterminée et imposée par la méthode, sans cependant rendre les autres perspectives inutiles.

    Enfin, je laisse de côté le débat sur la liberté, mais je pense que tu te contredis dans les termes 😉

     
  19. Troll de Mantes

    13 juin 2010 à 22:47

    Je te remercie pour cette discussion. J’ai beaucoup appris : comprendre ton point de vue a été très enrichissant. Mais tu ne sembles pas vouloir tenter de comprendre le mien… J’en suis désolé.

     
  20. Pierre

    13 juin 2010 à 22:58

    Ai-je déformé ta thèse dans mon dernier commentaire ? Tu remarqueras que j’ai évacué les conséquences « sociales » que je tirai apparemment à tort de ta pensée. Si j’ai déformé ta thèse (ce que tu sembles sous-entendre), en quel sens l’ai-je fait ?

     
  21. Troll de Mantes

    13 juin 2010 à 23:12

    Ma thèse est donc la suivante : « Il existe une réalité objective entièrement décrite sur le plan physico-chimique ».
    Selon ta thèse, il existerait une réalité objective non physico-chimique (en plus de la réalité physico-chimique).
    Selon moi, on ne peut débattre de l’existence ou de la non existence des atomes que dans le cadre d’une réalité physico-chimique (même si cette réalité ne recouvre pas toute la réalité selon ta thèse). La seule question qui reste est donc : une nouvelle théorie scientifique peut-elle remettre en cause les fondements de la théorie physico-chimique.

     
  22. Troll de Mantes

    13 juin 2010 à 23:25

    Je constate que ma thèse n’est pas exprimée clairement. Je la reformule : “Il existe une réalité objective qui se limite à la réalité physique”.
    C’est à dire « Réalité objective = Réalité physique » alors que pour toit « Réalité objective = Réalité physique + X ».

     
  23. Pierre

    13 juin 2010 à 23:41

    Je pense que les chances sont au mieux quasi nulles, car l’atomisme est une brique essentielle. Je ne vois ce qui pourrait venir remettre en cause cette théorie. Plus un élément theorique est important dans le système explicatif plus il faut de tres bonnes raisons pour le remplacer, et donc moins il a de chances d’être remplacé, surtout lorsqu’il a été adopté depis plusieurs siècles. Nous sommes donc d’accord pour dire que les atomes existent, que cette existence sera (au moins sur le mode de la probabilté selon moi) maintenue dans le futur.
    Notre désaccord demeure peut-être au niveau de la modalité de cette existence. Je pense que tu continues de maintenir qu’elle est réelle, ontologique (je doute de ma puissance persuasive). Je maintiens que cette existence n’est que symbolique, en tant qu’objet scientifique (je ne rappelerai pas que depuis le début je maintiens que nos concepts se basent cependant sur une correspondance avec la forme du réel lui-même). Je pense par exemple que la science pourrait très bien être totalement différente qu’elle ne l’est, précisément car nous disposons d’une liberté dans la production de nos concepts, même s’ils doivent faire l’épreuve du réel.

    Si tu limites la notion d’existence à la nécessité théorique, nous sommes d’accord. Si tu penses que l’atome existe réellement car la réalité est telle que le décrit la science, notre désaccord demeure. Seule l’épistémologie et les théories de la connaissance peuvent nous éclairer sur l’existence réelle ou non de l’objet d’une théorie Dans cette dernière branche de l’alternative, nous aurons au moins eu le mérite d’éclaircir les termes du débat et nos positions respectives.

    La première partie de ma réponse permet-elle de réunir nos deux points de vue ?

     
  24. Troll de Mantes

    13 juin 2010 à 23:46

    Est-ce que pour toi, il existe une réalité objective non physico-chimique (en plus de la réalité physico-chimique) ? C’est à dire que pour toi : “Réalité objective = Réalité physique + X” ?

     
  25. Pierre

    13 juin 2010 à 23:47

    Qu’appelles-tu réalité objective ?

     
  26. Troll de Mantes

    13 juin 2010 à 23:51

    « Qu’appelles-tu réalité objective ? »
    Pour moi c’est la réalité physique. Pour toi, je ne sais pas…

     
  27. Troll de Mantes

    14 juin 2010 à 22:25

    Je reprends la discussion, maintenant que la première partie de ton commentaire ait été publié, ce qui le rend compréhensible…

    J’ai cité le lien sur les « photographies » d’atomes pour montrer que l’utilisation de telles images étaient effectivement trompeuses et que ce n’est pas parce que je vois que cela prouve l’existence. Mais je ne vois pas en quoi, c’est un argument en faveur de la non existence des atomes. Les véritables « images » des atomes sont ds spectres, par exemple, qui n’a pas de « signification intuitive immédiate », mais qui n’en sont pas moins des « images » exactes des atomes.

    Einstein, l’argument d’autorité, toujours et encore… « La philosophie n’est pas l’un de ses domaines de prédilection » nous dit Wikipédia ( http://fr.wikipedia.org/wiki/Albert_Einstein ). Il est très étonnant d’appeler ce brave Albert à la rescousse pour prouver la non existence des atomes, pusique « L’une des prémisses d’Einstein est le réalisme, c’est-à-dire la doctrine selon laquelle les régularités observées dans les phénomènes ont leur origine dans une réalité physique dont l’existence est indépendante des observateurs humains (A. Castiel ds Le Monde quantique, 1984, p. 122). » ( http://www.cnrtl.fr/definition/r%C3%A9alisme ).

    Mais je ne vais pas argumenter plus longtemps puisque j’ai trouver LA PREUVE SCIENTIFIQUE IRREFUTABLE allant dans ton sens, pusiqu’ « elle démontre qu’il faut abandonner l’idée selon laquelle les propriétés des particules existeraient indépendamment des observations » :
    Voir http://www.larecherche.fr/content/actualite-matiere/article?id=22940 pour l’introduction.
    Voir http://www.larecherche.fr/content/recherche/article?id=23017 pour une explication plus complète.
    Mais l’interprétation reste encore sujet à discussion et l’article http://fr.wikipedia.org/wiki/Exp%C3%A9rience_d'Aspect est brllant sur ce sujet.

    Pourtant cela ne prouve toujours pas que « les atomes n’existent pas » ou alors la table qui est devant moi non plus ! A suivre si tu veux…

     
  28. Pierre

    14 juin 2010 à 23:29

    « image exacte » de quoi ?Du monde ? Tu es alors un réaliste naïf, au sens neutre de l’expression.

    Einstein nest pas partisan du réalisme naïf, juste de liens entre théorie et monde. Cf le billet d’origine : je défend déjà cela. Le monde en soi, indépendament de l’observateur est à jamais inaccessible. C’est une thèse fondée en raison, logique.Peut-être a-t-il évolué entre la,polémique avec Bohr (dans laquelle il se trompait !) et le livre que je cite, postérieur.

    Ce n’est pas parce qu’une activité n’est pas la préférée (prédilection) qu’on n’a pas les compétences pour l’accomplir. Einstein avoue d’ailleurs un grand intérêt pour la métaphysique.

    Depuis quelques temps déjà j’en appelle au principe d’incertitude : mais on me rétorque que je le comprends mal. Je m’abstiens donc de tout commentaire à ce sujet.

    Une remarque au passage. Il se pourrait que la science, dans sa quête idéale de la pure objectivité, se rende compte sur son propre terrain que ce n’est qu’une pure hypothèse méthodologique, ce qui ne remet pas en cause la force des sciences : juste celle du réductionniste. Quoi qu’il en soit, cette position épistémologique n’a pas à trouver son fondement premier dans les sciences dures.

    J’en conclue, à,la,lecture de ta dernière phrase, que tu n’adhère pas à une position autre que le réalisme naïf. Je t’invite donc désormais à creuser dans cette direction à partir d’ouvrages d’épistémologie, et non de Wikipédia. Je suis incapable de faire apparaître plus clairement les mauvaises raisons de postuler la réalité des objets scientifiques.

    Et pour répondre à une question antérieure : la réalité objective physique correspond à la perspective scientifique. Mais l’objectivité, comme tu l’auras compris, est un pur idéal théorique dans la recherche d’explication de ce qui apparaît. Ce qui existe réellement, le monde en soi n’est pas accessible, pas connaissable : ni par les sciences, ni par la métaphysique. On ne peut pas dire que l’atome existe, sauf en tant qu’objet au sein d’une théorie scientifique.

     
  29. Troll de Mantes

    15 juin 2010 à 0:00

    Je n’interpréte pas la citation d’Einstein comme toi.
    Je suis d’accord que « ce n’est pas parce qu’une activité n’est pas la préférée (prédilection) qu’on n’a pas les compétences pour l’accomplir. » Mais l’argument d’autorité est donc à relativiser. Et si sa position change au cours du temps, quelles sont les « bonnes » et les « mauvaises » citations ?

    Je persiste et signe sur le principe d’incertitude (ou alors je n’ai pas compris ce que tu disais) qui interdit de cannaitre simultanément la valeur de deux quantités physiques incompatibles. C’est ensuite l’interprétation dans une théorie donnée qui affirme que les deux quantités physiques n’ont pas simultanément une réalité objective. C’est cette théorie qui semble gagner du terrain dans les esprit, mais qui n’est pas encore scientifiquement admise…

    Pour le reste… Je pensais que l’on pouvait construire un raisonnement simple et rigoureux, mais cela ne semble pas possible. Sans doute suis-je moins doué qu’Einstein pour la philosophie… J’abandonne !

     
  30. Pierre

    15 juin 2010 à 22:09

    Ce n’est pas un argument d’autorité. Je n’ai choisi Einstein que parce que tu ne sembles faire confiance qu’aux scientifiques (sauf à Einstein !!!! 😀 ) et surtout parce qu’il se base sur la logique (donc rien d’irréfutable).

    Personnellement, je me réfèrerai plutôt aux penseurs de référence : Descartes, Hume, Kant. Un penseur a rarement une pensée fixe durant sa vie : cela atteste encore un peu plus le caractère historique et vivant du symbolisme humain. En général, un penseur va rectifier son point de vue et affiner sa vision du monde. Par principe, ce que pense un auteur (si deux positions se contredisent), c’est ce qu’il pense en dernier.

    Concernant le raisonnement « simple », je crois qu’on peut oublier. Pour la rigueur, tant que tu n’entends pas par là la rigueur des sciences dures (qui n’ont rien à dire sur l’existence réelle de leurs objets), pas de souci !

     
  31. Les réductionnismes scientifiques | Djaphil

    20 décembre 2010 à 2:34

    […] qu’à la suite de mon billet consacré aux atomes et à la question de leur existence (Cf. http://djaphil.fr/sujets/les-atomes-existent-ils-rapport-entre-sciences-et-monde-296), le réductionnisme s’est avéré à chaque fois être le coeur du problème dans les très […]

     
  32. Lorrain Gaëlle

    15 septembre 2012 à 16:01

    Encore un article très intéressant. J’ai hâte de trouver un peu de temps pour lire le mémoire sur Hans Jonas. Merci de mettre en ligne ces réflexions stimulantes.

     
  33. Seb.L

    11 juin 2013 à 12:16

    Quitte à faire mon affreux « scientiste », autant que ce soit à fond : toutes les idées que vous développez dans votre article, et dans les commentaires qui y sont associés, même si elles divergent fortement, sont le résultat de processus physiques et chimiques d’interactions entre les synapses de votre cerveau. Autrement dit, la pensée, l’idée, le développement théorique, même s’ils sont immatériels, ont besoin du support de la matière pour exister. Ou alors, démontrez-moi scientifiquement l’existence d’une entité psychique, capable de penser, et débarassée de tout support matériel.
    La notion de représentation atomique, telle qu’on peut la voir au collège (ces jolies boules de grandeurs et de couleurs différentes) est une représentation, certes compréhensible, mais sans doute très éloignée de ce qu’un théoricien quantique pourrait vous en dire (je ne suis pas spécialiste mais je m’informe), ou de la vision de la matière comme corde vibrante, ouverte ou fermée, avec un univers doté de multiples dimensions au-delà des quatres qui sont accessibles à notre conscience par l’entremise de nos sens, donc de notre matérialité. Vouloir douter de l’existence de l’atome, c’est mettre en doute l’interaction douloureuse entre la matière composant le bout de votre pied et celle du piano qui vient de lui tomber dessus : seriez-vous prêt à tenter l’expérience ?

     
  34. granfred

    23 janvier 2015 à 15:21

    Il n’est jamais cité, mais celui qui a donné la meilleure description « scientifique » du monde s’appelle Walter Russell.